Lunettes et télescopes

La Silla
L’observatoire de l’ESO (European Southern Observatory) à La Silla au Chili, avec en particulier le télescope de 3,6 mètres en haut à gauche. Crédit : ESO

Le développement de l’astronomie à partir du XVIIe siècle et l’accélération foudroyante des découvertes au XXe siècle sont avant tout le fruit de l’amélioration constante des moyens d’observation du ciel.

En effet, en l’espace de trois siècles l’instrumentation astronomique a fait des progrès prodigieux. Alors que la lunette de Galilée n’avait que quelques centimètres de diamètre, les astronomes ont aujourd’hui à leur disposition d’énormes télescopes dont le diamètre peut atteindre 10 mètres.

En même temps, l’observation astronomique, d’abord limitée au domaine visible, s’est peu à peu appropriée tous les autres domaines, depuis les ondes radio jusqu’aux rayons gamma.

Pour couronner le tout, l’homme s’est même approprié l’espace, puisqu’une armada de satellites s’est affranchie de l’atmosphère terrestre pour mieux observer le ciel et qu’une petite flottille de sondes spatiales sillonnent le système solaire.

Les lunettes

Le premier instrument d’observation autre que l’oeil fut la lunette astronomique. Il s’agissait simplement d’un ensemble de deux lentilles, l’une assez grosse qui concentrait les rayons lumineux en un point appelé le foyer, l’autre plus petite qui agissait comme une loupe et permettait d’observer la minuscule image de l’objet qui se formait au foyer.

L’intérêt d’un tel instrument était double.

D’abord, la lunette donnait une image agrandie de l’objet grâce à la combinaison de lentilles. Elle permettait d’observer planètes ou nébuleuses en détail et de mettre en évidence des caractéristiques invisibles à l’oeil nu. C’est grâce à cela que Galilée, le premier astronome à utiliser une lunette, fut en mesure de faire tant de découvertes, depuis les reliefs de la Lune jusqu’aux satellites de Jupiter.

Le deuxième intérêt de la lunette était de collecter plus de lumière que l’oeil. La quantité de lumière capturée par un instrument était d’autant plus importante que le diamètre de la grosse lentille était grand. Lorsque ce diamètre augmentait, les images devenaient plus brillantes et, surtout, des objets trop peu lumineux pour être perçus à l’oeil nu devenaient alors facilement visibles. C’est grâce à cela que Galilée, en tournant sa lunette vers la Voie Lactée, put apercevoir pour la première fois une myriade d’étoiles qui n’avaient jamais été observées.

Une fois l’intérêt des lunettes astronomiques démontré, il restait à accroître leur diamètre afin d’augmenter leur résolution angulaire, la capacité de voir des détails très fins, et leur pouvoir collecteur, la capacité de collecter une grande quantité de lumière.

La plus grande lunette de Galilée n’avait que cinq centimètres de diamètre, mais avec les progrès techniques dans la fabrication des lentilles, des instruments de plus en plus grands furent construits.

On peut par exemple citer la lunette de 24 centimètres construite en 1824 à l’observatoire de Dorpat en Estonie ou celle de 38 centimètres en 1847 à Cambridge aux États-Unis. Les plus grandes lunettes furent réalisées à la fin du XIXe siècle avec par exemple celle de 83 centimètres de l’observatoire de Meudon en 1889 ou celle d’un mètre à l’observatoire de Yerkes en 1897.

La progression s’arrêta à ce point car elle se heurta à des limitations technologiques insurmontables. En particulier, ces énormes lentilles se déformaient sous leur propre poids, ce qui affectait fortement la qualité de leurs images. En outre, il était très difficile d’obtenir des blocs de verre de grande taille avec une pureté suffisante.

Ces difficultés expliquent que lorsque l’heure fut venue de construire des instruments gigantesques, la lunette fut remplacée par le télescope.

Les télescopes

A la différence d’une lunette, un télescope n’utilise pas de grande lentille pour concentrer la lumière, mais se sert d’un grand miroir de forme sphérique qui réfléchit les rayons lumineux et les renvoient tous en un même point appelé le foyer.

L’avantage du télescope réside dans le fait qu’un miroir est beaucoup plus facile à soutenir qu’une lentille, ce qui permet d’atteindre des tailles bien supérieures au mètre sans problème de déformation.

Les premiers télescopes furent développés dans la deuxième partie du XVIIe siècle, en particulier par Isaac Newton.

Les progrès techniques permirent alors une rapide augmentation de taille. On peut en particulier citer le télescope de 1,22 mètres construit en 1789 par William Herschel et celui réalisé par Lord Rosse en 1845 avec un miroir de 1,83 mètres.

Finalement, le XXe siècle vit se développer des télescopes gigantesques. Le premier fut construit en 1918 sur le Mont Wilson en Californie avec un miroir de 2,54 mètres. Puis ce fut le télescope Hale de 5,08 mètres érigé au sommet du Mont Palomar en 1949.

Évidemment, des miroirs de cette taille avaient comme les grandes lentilles tendance à se déformer sous leur propre poids. Pour aller plus loin, à partir des années 1980, il fallut développer de nouvelles technologies.

La première solution consista à utiliser un ensemble de plusieurs petits miroirs séparés, au lieu d’un seul grand bloc. Cette méthode est par exemple utilisée dans les deux télescopes Keck situés au sommet du volcan Mauna Kea à Hawaï. Le miroir de chaque télescope est en fait une mosaïque de 36 petits miroirs de 1,80 mètres qui ensemble donnent un diamètre équivalent de 10 mètres.

La deuxième possibilité consiste à construire des miroirs de grande taille mais très minces. C’est le cas du New Technology Telescope (NTT) de l’observatoire européen austral (ESO) à La Silla au Chili, qui possède un miroir de 3,5 mètres. Du fait de sa minceur, le miroir du télescope n’est pas très rigide et se déforme donc facilement. Pour conserver une forme parfaite, il est équipé d’un système d’optique active, un ensemble de petits pistons à l’arrière du miroir qui peuvent agir sur celui-ci et lui donner en permanence une forme idéale.

Pour plus d’infos : Des lunettes aux télescopes extrêmement grands.

Mauna Kea
Les observatoires au sommet du volcan Mauna Kea sur l´île d’Hawaï. Les six principaux, de gauche à droite : JCMT, Subaru, Keck 1, Keck 2, CFHT et Gemini. Crédit : IfA/Richard Wainscoat

Mis à jour le 24 août 2023 par Olivier Esslinger