L’astronomie de l’Egypte ancienne

Papyrus Greenfield
Dans la mythologie égyptienne, la déesse Nout représente le ciel, Shou l’air et Geb la terre. Cette image montre une partie du papyrus Greenfield (1025 avant notre ère) où l’on voit le corps de Nout, tenu en place par Shou, et celui de Geb, au sol. Crédit : British Museum

Si seulement la Bibliothèque d’Alexandrie avait résisté aux guerres et aux conquêtes ! Malheureusement, nos connaissances sur l’astronomie de l’Egypte ancienne sont très limitées et nous viennent de rares papyrus ainsi que de quelques inscriptions sur des tombes ou des temples.

L’astronomie avait une très grande importance pour la civilisation égyptienne, tant d’un point de vue religieux que dans l’organisation de la vie de tous les jours, en particulier dans la mesure du temps.

Une année solaire de 365 jours

Du fait de la révolution annuelle de la Terre autour du Soleil, la position apparente de notre étoile par rapport à la voûte céleste se déplace lentement vers l’est au cours de l’année. Par conséquent, chaque matin, de nouvelles étoiles qui étaient auparavant perdues dans les lueurs de l’aube deviennent visibles à l’horizon juste avant le lever du Soleil. On appelle cette première apparition dans l’année le lever héliaque (du mot grec pour le Soleil : helios).

A l’époque de l’Egypte ancienne, La crue du Nil se produisait tous les ans autour du 19 juillet. Pure coïncidence, c’est aussi à cette époque que l’étoile la plus brillante du ciel, Sirius, appelée Sothis en grec et Sopdet en égyptien, avait son lever héliaque et faisait donc sa première apparition de l’année. Comme la crue du Nil allait fertiliser les terres et nourrir le peuple, l’observation du lever héliaque de Sirius, et plus généralement du ciel nocturne, devint un élément essentiel de la civilisation égyptienne.

En basant leur mesure du temps sur le mouvement apparent du Soleil, plutôt que sur les cycles de la Lune, les Egyptiens inventèrent le calendrier solaire. Comme le lever héliaque de Sirius se produisait approximativement tous les 365 jours et nuits, ils divisèrent l’année en 365 jours. Comme le cycle de la Lune durait à peu près 30 jours et nuits, ils divisèrent l’année en 12 mois de 30 jours, chaque mois étant encore divisé en trois décades de 10 jours.

Enfin, pour arriver à un total de 365, ils ajoutèrent cinq jours supplémentaires, appelés les jours épagomènes, qui devinrent des jours de célébration des dieux Osiris, Seth, Isis, Nephtys et Horus.

Comme l’année astronomique ne dure pas exactement de 365 jours, le calendrier égyptien dérivait doucement par rapport au cycle de la voûte céleste, d’environ une journée tous les quatre ans. La crue du Nil ne coïncidait donc avec le début officiel de l’année que tous les 1460 ans, une longueur de temps qu’on a baptisé la période sothiaque.

Il faudra attendre que Jules César instaure le calendrier julien et ses années bissextiles en 45 avant notre ère pour que le calendrier soit mieux aligné sur les astres.

Une journée de 24 heures

Les Egyptiens inventèrent aussi le découpage du jour en 24 heures. Pour mieux se retrouver dans la voûte céleste et mesurer le passage du temps, ils découpèrent le ciel en petits groupes d’étoiles bien reconnaissables qui se levaient les uns après les autres au cours de la nuit. Pour coïncider avec les décades de 10 jours, chaque groupe d’étoiles avait été choisi de telle façon que son lever héliaque soit séparé du précédent de 10 jours. On comptait donc 36 groupes d’étoiles, qu’on baptisa les décans.

Puisque la longueur de la nuit dépend des saisons, le nombre de décans observables pendant une nuit est variable. Mais au début de l’été, à l’époque du lever héliaque de Sirius, la nuit ne dure qu’environ 8 heures et seuls 12 décans sont observables. Ce nombre fut pris – de manière un peu arbitraire – comme base du nouveau système. Le principe fut étendu à la journée, elle-même découpée en 12 heures. C’est ainsi que les Egyptiens établirent la journée de 24 heures que nous utilisons encore.

Les monuments égyptiens

La fascination des Egyptiens pour le ciel s’est aussi traduite dans l’architecture de certains de leurs monuments. Par exemple, les grandes pyramides de Gizeh étaient alignées sur les quatre points cardinaux avec une précision impressionnante, de l’ordre de quelques minutes d’arc. Bien sûr, du fait de la précession des équinoxes, le nord de l’époque n’était pas dans la direction de l’étoile polaire actuelle, mais dans celle de l’étoile Thuban, dans la constellation du Dragon.

Un autre exemple connu est le temple d’Amon-Rê à Karnak, qui était quant à lui aligné avec la direction du Soleil levant lors du solstice d’été.

Les mythes égyptiens

Les Egyptiens avaient une mythologie très riche et souvent associée aux phénomènes célestes. Dans certains textes, le monde était une grande boîte rectangulaire dont les côtés nord et sud étaient les plus longs. Sur cette boîte se trouvait un plafond plat, supporté par quatre piliers. Ces derniers étaient connectés par une chaine de montagne et une rivière céleste s’écoulait tranquillement dans une saillie le long cette chaine. Des barques naviguaient sur cette rivière céleste et transportaient la Lune, le Soleil et les planètes.

Dans une autre interprétation, c’était le corps de la déesse Nout, déployé au-dessus du monde, bras et jambes écartés, qui formait la voûte céleste. Son utérus engendrait chaque matin le Soleil à l’est et sa bouche l’avalait à la tombée de la nuit à l’ouest. Geb, le dieu de la Terre, était couché sous Nout, son épouse et soeur.

Tous les corps célestes étaient généralement associés à des divinités. Le Soleil représentait différents dieux en fonction de sa position dans le ciel, Khépri à l’aube, Rê à midi et Atoum le soir. La Lune représentait elle-aussi plusieurs divinités, Aah, Thot et Khonsou.

La constellation d’Orion avait une importance toute particulière et évoquait Osiris, le premier enfant de Nout et Geb, dieu de la mort et du renouveau. La mort d’Osiris et sa renaissance étaient de puissants symboles de la sécheresse annuelle de l’Egypte toujours suivie de la crue du Nil et de la fertilisation des terres.


Mis à jour le 24 août 2023 par Olivier Esslinger